PART 1/3
☺   CAPTURER L’INSTANT
Techniques de captation

Période Ancienne (1839 - 1880)
Durant cette période est arrivée l’invention de la photographie, la photographie noir et blanc, le positif pour tirage papier avec noircissement direct. Les supports utilisés sont la plaque métallique, le papier, la plaque de verre.



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Période ancienne classique (1880 - 1925)
Au cours de cette période apparaît l'avènement des procédés gélatino-bromure d’argent et aussi l’industrialisation, le noir et blanc et la couleur ainsi que le tirage papier par contact. Le support utilisé est : la plaque métallique, le papier, la plaque de verre, le film souple.

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Période Moderne argentique (1925 - 2007)
Période d'industrialisation des procédés de développement. Les supports sont le verre, le film souple et le papier.



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Période Moderne numérique ( 1985 - 2007)
Les procédés connaissent des évolutions comme le noir et blanc et la couleur. Le procédé informatique est mis en place. Les supports principaux sont : la bande ou le disque magnétique, le disque optique.

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En 2016 la photo devient un moyen de communication de masse avec les capacités des smartphones et l'essor des réseaux sociaux.

PART 2/3
☺   CAPTURER L’INSTANT
Mise en exergue
de fragments et techniques
L’instant c’est le moment vécu par l’auteur de l’image.

Chacun possède ses propres moyens de se souvenir et en découle une sensibilité personnelle. Le seul point commun à ces différentes sensibilités que l’on peut noter est la notion périssable de l’instant. Lors de la captation, le regard change d'orientation, on prend en urgence ce qui est éphémère du point de vue du temps et risque de disparaître, en priorité face à une scène en soit éternelle (un paysage par exemple). On peut alors dire que lors de vacances en Italie, imaginons, seront favorisés les portraits ou scènes de vie des enfants plutôt que la mer et la montagne, toujours présentes quand les enfants seront alors adultes.

La pratique c’est alors la volonté qui se retrouve derrière la prise d’une image.
« Je préfère des photos des gens en soi, je prend parfois des paysages ou des trucs bateaux mais après coup en fait je m'en fou. ».
Capucine de Beaumont - Extrait d’interview (intégralité en annexe).
Araki Nobuyoshi, photographe japonais reconnu pour ses photographies de nus, de bondage et son rapport à la mort, a réalisé une série de clichés tous répertoriés dans son ouvrage Senchimentaru na tabi Fuyu no tabi. L’ouvrage comptant approximativement 300 pages explore sa relation avec sa femme au cours de leurs années de vie commune et de son rôle dans la carrière de celui-ci. Des clichés de leur lune de miel en 1971 pour ensuite passer aux six mois précédents la mort de celle-ci ainsi que quelques clichés post-mortem composent cette collection. La volonté de l'artiste est de capturer l'image de sa femme à l'aide de plusieurs éléments (objets communs, scènes, portraits…). Chacune de ces captations, comme il l'explique, représentent sa femme. Il est cité comme précurseur d’un courant mettant en scène des moments et aspects intimes de la vie du photographe et deviendra fondateur du courant photographique plus tard appelé photographie de l'intime.
« Mon propre souvenir est capturé au moment même où je prends la photos. C'est finalement l'appareil photo qui me sert de mémoire. »
Citation d’Araki Nobuyoshi - extrait du blog d’Anémochoria, la photographie au gré du vent “Surface Sensible.”
Avec cette collection, l’artiste affirme que la photographie souvenir peut passer par bien des biais, directs avec la prise de clichés personnels, mais aussi indirects avec des lieux, accessoires et scènes communes. Lors des premières photographies, il n’y avait pas place à cette possibilité de prendre des milliards de photographies, sur un coup de tête dû au manque de moyens. En 1950 on se rend beaux, attrayants, la captation est tirée à quatre épingles. On condense une vie en une image chez un photographe, lors d'un événement social et/ou personnel, venant retracer une époque, une personne en quelques instants.
«Si l’on reprend les évolutions formelles des codes de la photographie familiale, on ne peut manquer de remarquer le glissement de la photographie posée chez un photographe à celle prise sur le vif par un membre de la famille ». Irène Jonas - Sociologie de l’art, L’interprétation des photographies de famille par la famille, éditions l’Harmattan, juillet 2009, pages 53 à 70.

« La manière de photographier change aussi dans la mesure où les photos ne sont plus « posées ». À la photographie posée se substitue ainsi une photographie qui cherche à capturer le « naturel », le « vrai » ou encore le spontané. » Anne Bationo et Moustafa Zouinar - Les usages avancés du téléphone mobile, Les usages vidéos amateurs sur le téléphone mobile, éditions La Découverte, 2009, pages 141 à 164.
C’est donc un effet domino, une réaction en chaîne suite à des évènements ayant eu lieu dans le domaine de l’image. La mise en place de plusieurs moyens de captation ont permis de créer en masse des données visuelles. Les Home movies sont, quant à eux, des rituels venant séquencer des événements considérés comme des points d'ancrage au fil de la vie. Le Home movie est un film amateur court généralement réalisé uniquement pour conserver un enregistrement visuel des activités familiales, des vacances ou d’un événement spécial, et destiné à la famille. Aujourd’hui comme hier, dans la plupart des cas, les événements filmés sont des moments dit exceptionnels et le plus souvent positifs tels que des mariages, anniversaires, repas de famille, vacances etc.

Le support est l’objet, le médium utilisé pour faire exister l’image.
« J'utilise l'appareil jetable pour les festivals ou les vacances, seulement ça. Je n'en utilise pas à d'autres moment, j'ai l'impression que ça donne une singularité à l’instant ». Elise Naudeau - Extrait d’interview (intégralité en annexe).

« Pour moi, l'argentique ça vaut plus le coup, tu fais attention à ce que tu prends, elles ont plus de valeur, c'est en une seule fois, y a un tri que tu dois faire au préalable ». Tenzin Mogaburu - Interview orale.
Capter à l’argentique ici, c'est capter un infime moment sur une petite bande de pellicule photosensible, dans l'espoir de traduire parfaitement le souvenir, et de le déposer délicatement sur le support. Cet argument est lui, une réponse à la notion de masse et l'évolution des moyens ainsi que leur multiplication. La photographie contemporaine et numérique permet aujourd’hui un flux continu qui parfois peut sembler en désaccord total avec la notion d’un instant précieux, fragile et éphémère.
2. Action de capter


3. mouvement dans lequel le photographe cherche à échapper à la vocation "objective" de son médium. La photographie de l'intime est à la limite du voyeurisme et de la transgression, l’appareil devient carnet de notes du quotidien, outil d’introspection, journal intime..

a_ René Groebli magie and Melancholie. Photographies représentant sa femme lors de leur lune de miel et dans leur vie privée. Ces deux séries sont intéressantes car elles amènent une autre manière de photographie ; la volonté de mettre en scène des moments intimes de la vie du photographe et de ses proches.

@theguardien @Artnet
b_ Araki nobuyoshi Senchimentaru na tabi Fuyu no tabi 1991. Première photographie représentant sa femme lors de l’enterrement de celle-ci, seconde photographie d’un portrait de sa femme mis en scène et de leur chat.

@MoMa @MoMa
4. Support, intermédiaire.

Photographies achetées lors de la brocante des antiquaires de Toulouse. Elles représentent des vacances en famille et des personnes anonymes. L’intérêt est la volonté de capter l’instant et le souvenir du moment passé de par la représentation et la mise en scène de proches devant certains paysages.

brocante des antiquaires - Toulouse brocante des antiquaires - Toulouse
PART 3/3
☺   CAPTURER L’INSTANT
Implusions à la captation
Dans son œuvre La chambre claire parut en 1980, Roland Barthes s’interroge sur la nature et apprécie le caractère fragmentaire de la photographie. Par caractère fragmentaire ici nous entendons une caractéristique propre à la photographie qui est inexplicable et donc fragmentaire.
« Certaines photographies touchent en moi un point enfoui, {…} C'est un don, une grâce à un supplément inanalysable que je reçois en plein visage. La photo n'est plus quelconque, elle me touche à vif ».
Roland Barthes, La chambre claire, Editions de l’étoile, Gallimard, Le seuil, 1980.
Il appellera par la suite ce point inconscient le punctum, mot provenant du latin qui agit comme une petite tâche, petit trou, piqûre…
« Le punctum d’une photo, c’est ce hasard qui, en elle, me pointe (mais aussi me meurtrit, me poignarde). »
Roland Barthes,La chambre claire, Editions de l’étoile, Gallimard, Le seuil, 1980, page 48-49.
Il finira d’ailleurs par nommer ce punctum « ça a été », comme si la scène captée permettait de ramener à la surface un état d'esprit, une vie, des émotions bien plus profondes et inconscientes que l'on ne pourrait l’imaginer.
La photographie, ou bien même la vidéo, sont un moyen permettant la retranscription non pas d'une image mais d'un instant sur un support qui dans l'imaginaire sera éternel.
Il ajoute que « Quoi qu'elle donne à voir et quelle que soit sa manière, une photo est toujours invisible : ce n'est pas elle qu'on voit ».
Roland Barthes, La chambre claire, Editions de l’étoile, Gallimard, Le seuil, 1980, page 18.
Une photo reste comme invisible, c'est l'instant et les sensations l'accompagnant qui se retranscrivent et c'est aussi ici son objectif premier. Il s'agirait alors, par le biais de différents moyens, de se mettre en avant, de raconter, de montrer et de rappeler. Navy Millet, photographe picarde, est un exemple concret de ce besoin et cette richesse du souvenir sur support. Elle parle d'une photographie prise lorsqu'elle vivait encore dans son pays d'origine avant de se réfugier en France.
« Cette image m’aide à me souvenir. Elle fait partie de mon histoire. Aujourd’hui, si elle est jaunie et écornée, elle n’a perdu aucune valeur ».
Navy et Richard Millet « Notre vision de la photographie ; bien plus qu’un souvenir ».Histoire de famille à Chantilly, 4 novembre 2017.(consulté le 20/10/2022).
Il s'agit pour elle du souvenir et de l’un des objets le plus important de sa vie, ramenant à elle des instants et des sensations qu'elle a pu connaître des années auparavant. En ce sens, le punctum décrit par R. Barthes est bel est bien présent. La photographie en question a ce je-ne-sais-quoi qui vient la piquer, l’atteindre, toucher une partie de son inconscient précis et réveiller des émotions.
« L’important ce n’est donc pas ce qui est « contenu » dans les images mais les processus de remémoration et les interactions qu’elles suscitent. »
Odin R. « Le film de famille : de merveilleux documents ? Approche sémio-pragmatique », Le film de famille, Publications des facultés universitaires Saint-Louis, éditions N. Tousignant, Bruxelles, 2004.
L’image n’est qu’un moyen de stimuler la mémoire en ce sens. Elle n’est pas la finalité telle qu’elle. Elle peut bien sûr l’être, et y participe. Mais ce qui crée l’engouement et son importance n’est pas simplement l’objet tangible. Elle permet une remémoration active d’un événement, une personne, un lieu… un souvenir quel qu'il soit.

Avec l’ouvrage Les usages avancés du téléphone mobile, Anne Bationo et Moustafa Zouinar étudient par ailleurs la pratique de la vidéo et de la photographie dans le contexte du film de famille et reviennent sur la volonté de filmer des événements particuliers, extraordinaires, comme exprimé plus haut. Mais les destinataires de ces événements et de ces supports ont généralement déjà vécu l'événement.

L’étude rapporte que l’objectif alors ne serait pas de créer un documentaire de la vie de chacun mais plutôt de revenir sur un passé vécu tous ensemble. Ils permettent alors pour la personne obtenant la photographie ou la vidéo de se souvenir et de revivre l'émotion de l'instant. Pour les personnes présentes de le voir elles aussi de leur propre point de vue, pour les proches, de connaître l'instant et de se le voir raconter, et pour les générations futures, de pouvoir leur laisser une trace de notre passage. Dans les grandes lignes : permettre une remémoration familiale et individuelle. Alors, pour reprendre les idées de Roland Barthes, la photographie (ou bien même la vidéo) reviendraient à cristalliser un instant, assouvissant en un sens la volonté d'éternité et d’immortalité. Pour reprendre l'exemple de la photographie de Navy Mille, en plus de permettre un processus de remémoration, elle est un cliché important dans l'idée d'offrir un recueillement. Cette photographie, elle veut la léguer à son fils, lui permettant de se souvenir de sa mère et de qui elle a été. L'image n'est qu'une infime seconde de vie, mais le message véhiculé par celle-ci peut durer des années.

Au cours de l’ensemble de ces trois parties, l’étude des différents éléments et des différentes impulsions à la captation ont permis de mettre en lumière l’accessibilité et la multiplication des moyens et techniques de captation. Aussi, elles ont pour objectif de mettre en évidence des archétypes présents dans l’usage commun et des intentions communes malgré les générations et les différentes classes sociales.
5. Dérivé de fragments, soit, petite partie, parties d’un objet cassé,séparé de son tout.

6. piqûre, point.

Photographies prises lors d'un mariage en Bourgogne dans la famille Balligand. Il était d'usage, lors du mariage, de faire venir un photographe afin de prendre un portrait de chaque parties de la famille. Famille Balligand - Bourgogne Famille Balligand - Bourgogne
Photographies personnelles prises à des instants précis lors du ressentis du "punctum". L'intérêt est de démontrer ici la pratique de la photographie qui est finalement et personnelle, et abordable à chacun dans l'objectif de la création de souvenir. Guillaume Balligand - Dublin Famille Baccarin - Moselle Papa - Moselle Home movie of Beverly Hills (1935-1847) Archive de l'académie du film et de l'académie des oscars.


East Anglian Film Archive - 1951 Home Movie